mardi 30 novembre 2010

Des fleurs pour Billy Milligan



Compte-rendu de Les Mille et une vie de Billy Milligan de Daniel Keyes

Quand j'avais 15 ans environ, mon père m'a conseillé de lire "Des fleurs pour Algernon", superbe roman de Daniel Keyes. J'ai braillé comme un veau et découvert un auteur dont je n'ai pas réentendu parler...jusqu'à ce que cet été je vois dans le présentoir "suggestions" de ma bibliothèque municipale son dernier livre: Les Mille et une vie de Billy Milligan. Honnêtement, la barre était haute et rien, non rien n'aurait pu m'avertir de la bombe que j'avais entre les mains.


En Ohio, dans les années 1970, la police arrête un homme que 3 femmes accusent de viol. L'homme nie farouchement et résiste à son arrestation, mais une fois au poste de police, les agents de l’ordre réalisent que quelque chose ne tourne pas rond chez le suspect. En effet, William Stanley Milligan, mieux connu sous le sobriquet de Billy semble...étrange. Il cesse soudainement de parler, tombe dans un état catatonique quelques secondes, puis prend une voix qui n’est pas la sienne, puis une autre...avec un accent anglais. Suite à une expertise psychiatrique, on s'aperçu que Billy souffre du symptôme de personnalité multiple...et que le vrai Billy Milligan « dort » en fait depuis 6 ans, soit le jour où il a tenté de se jeter du toit de son école. Depuis, ses personnalités ont décidé de prendre le contrôle de son corps et de sa tête, pour son bien.
Aussi incroyable que cela puisse paraitre, Billy Milligan existe réellement. Le roman est basé sur des rencontres que l'auteur Daniel Keyes a faits avec le jeune homme, dans les multiples hôpitaux/prisons où il a vécu. Car si Billy Milligan fut la première personne à être officiellement reconnu comme souffrant du trouble de personnalité multiple, son parcours et ceux des médecins qui ont voulu l'aider ne s'est pas fait sans heurt. Au contraire. (Pour ceux que ça intéresse, Daniel Keyes a écrit une suite à ce roman: Les Mille et une guerre de Billy Milligan, sur son parcours dans les hôpitaux psychiatriques, les prisons et sa guerre pour être reconnu officiellement comme étant atteint d’une maladie mentale).
Autant ce livre qui relate la vie de Billy vu par ses personnalités paraît incroyable, autant il l'est, incroyable. Billy Milligan possèderait ce qu'on appelle une mémoire absolue, ce qui lui permet de se souvenir de toutes ses vies, même celles qu'il n'a pas vécu, parce qu'il "dormait". Ce livre rappel Des fleurs pour Algernon par son plaidoyer pour un traitement adéquat des maladies mentales et se lit comme un roman policer. Il vous tiendra en haleine, vous fera vous tenir au bout de votre chaise, vous fera pleurer tant le monde semble injuste pour ce pauvre Billy. Il vous permettra de mieux connaitre cette maladie extrêmement rare qu'est le trouble de personnalité multiple et vous fera revoir votre perception du bien et du mal...Car qui est Billy Milligan? Un acteur? Un fraudeur? Un criminel? Ou un enfant maltraité par un beau-père tyrannique?
Un livre à lire, sans hésitation. Et en passant, si vous n'avez jamais lu Des fleurs pour Algernon, c'est aussi un livre à livre au plus vite.

Sauver l'humanité du péril



Compte-rendu des Gestionnaires de l'Apocalypse de Jean-Jacques Pelletier

J'adore les romans policier et les romans d'horreur, gore, à la Patrick Sénécal et Graham Masterton. J'aime quand ça se tire dessus, quand il y a des conspirations internationales qui mettent l'humanité en péril et j'aime quand les corps explosent dans tous les sens. J'aime quand les bons gagnent à la fin, mais j'aime encore plus quand il y a des dommages collatéraux et que des bons meurent dans l'exercice de leur fonction (qui est d'être du bon côté de la force et de sauver les autres à tort de se sauver eux-mêmes). Des livres policer (et d'horreur), j'en ai lu une tonne avec les années. Je suis devenue hyper critique, difficile et vachement chialeuse. Violente même. La preuve? Le roman "Pig Island" de Mo Hayder, je l'ai lancé sur le mur quand je l'ai fini. Mauvais, mauvais, mauvais. C'est dire si j'attendais la conclusion des Gestionnaires de l'Apocalypse de Jean-Jacques Pelletier avec une tonne de briques et de fanaux. J'étais prête à l'encenser et lui faire construire une statue ou à le renier et à lui jeter des mauvais sorts à l'aide d'une poupée vaudou. Finalement, tout est bien qui finit bien: j'ai a-do-ré La faim de la terre 1 et 2. Mais revenons un peu en arrière.
Les Gestionnaires de l'Apocalypse est une fresque extrêmement ambitieuse écrite par Jean-Jacques Pelletier, un professeur de philosophie du Cégep Lévis-Lauzon. La série compte 10 livres, soit:
-L'homme trafiqué, premier de la série qui relate les débuts de F., directrice de l'Institut qui-combat-les-méchants.

-La femme trop tard, l'histoire de Claudia, agente de l'Institut elle aussi

-Blunt, les treize derniers jours, aussi un agent de l'Institut.

Ces trois livres sont en quelque sorte des préludes de l'histoire qui suit. Vous pouvez les lire avant, après ou jamais. Ils sont utiles à la compréhension de l'histoire, mais pas essentiels.
Ensuite, la série à proprement dite:

-La chair disparue
-L'argent du monde (2 tomes)

-Le bien des autres (2 tomes)

-La faim de la terre (2 tome)
Qu'est-ce que ça raconte? Dans le monde d'aujourd'hui, une organisation internationale (mais basée au Québec) nommée le Consortium, veut organiser la nationalisation des mafias internationales. Pourquoi? Pour faire de la gestion du crime une PME. Le Consortium met à leur disposition: vente d'organe et prostitution (réseau nommé Body Shop), de drogue (Candy Shop), de blanchissement d'argent (Safe Heaven), etc. De l’autre côté de la force se démène l’Institut, avec à sa tête F., femme énigmatique et flegmatique, Jean-Paul Hurt, inspecteur aux personnalités multiples, Blunt, joueur de Go et bien d’autres… Mais chez Jean-Jacques Pelletier rien n’est jamais simple et chaque roman amène son lot de surprise et de rebondissement, jusqu’au dénouement final…Qui ne m’a honnêtement pas déçu.
Les points forts sont que les situations, malgré leur côté souvent improbables et invraisemblables sont tellement bien présentées qu’on y croit sans hésiter. Que la série se passe au Québec aussi permet à l’auteur d’égratigner au passage les médias (et la radio-poubelle) et de traiter de la protection de l’environnement sans jamais être moralisateur…et de vous amener à êtres très, très paranoïaque. On y croit, on a peur et on voit après la lecture des conspirations partout. Le tout est servi avec beaucoup d’humour noir et l’auteur ne tombe jamais, jamais dans la facilité, ce qui lui vaut toute mon admiration.
Ses points faibles sont sa longueur, qui peut en décourager plus d’un et qu’il y ait tant de personnages. Certains d'entres eux disparaissent trop vite et laissent derrière eux plus de questions que de réponses (je pense surtout à Ute Breytenbach). Tant de personnages aussi demandent une excellente mémoire…et une bonne capacité de lecture. Tenez vous le pour dit : ce n’est pas un livre à commencer sur une plage de Cuba : vous aurez besoin de toute votre concentration pour suivre le récit et pour vous rappeler qui est qui, qui fait quoi, etc. Mais l’effort en vaut la lecture, croyez moi.
Les Gestionnaires de l'Apocalypse est une série à conseiller à ceux qui croit aux conspirations internationales, qui aiment les romans d'espionnages et les descriptions bien juteuses de corps qui giclent et qui se brisent...Mais pas à ceux qui aiment les lectures « légères ».
Jean-Jacques, je vais te la construire ta statue.

Liste égocentriste de tout et de rien

1-Liste des plus beaux moments passés en famille
-Les réveillons du 24 décembre; le père Noël avec sa barbe en feutrine blanche...
-Les soupers du samedi soir où un mot égaré était prétexte pour un délire.
-Les nuits dans le Petit Chalet Bleu, avec maman, papa, sœurette et moi-même. Un espace aussi confiné, ça créer des liens je vous jure.

2-Liste des plus grands rêves d'enfances
-Être duchesse du Carnaval
-Être la fée des glaces
-Être une sirène
(J'ai été fée des glaces pendant un party de noël corporatif et j'ai détruit les illusions d'une petite fille...je vous raconterais ça un jour).

3-Liste des meilleurs amies
-L'une habite en Alberta
-L'autre en Polynésie
-L'autre à Montréal
Elles sont toutes trois supers importantes, la prunelle de mes yeux. Si je les perdais, je ne m'en remettrais jamais. Je vous aime, mes belles amies!!

4-Liste des plus beaux moments passés avec ces dites amies
-Alberta: fous rires, pizzas pochettes et raquette de badminton
-Polynésie: bonne bouffe, jeu de mimes et cinéma le mardi soir, parce que ce n'est pas cher
-Montréal: confidence, rue Lamontagne et art improvisé après le film: ''Eyes Wides Shut'' à l'Ilot Fleurie.

5-Liste des meilleurs ''casses'':
-''Hey yo, ça va?'' ''Ça allait...'' ''Tu veux dire que depuis que je suis là, ça va plus?'' ''C'est en plein ça.'' ''Bon..ben je pense que je vais m'en aller..'' ''Ben c'est ça.'' Mon amoureux et un impoli, lors de notre première sortie...L'Impoli s'est amené à notre table...et voilà.
-Mon père qui annonce à sa belle-mère que sa fille est enceinte, avant son mariage( je vous laisse deviner l'opinion de mon aïeule): ''Belle-mère, vous aimer ça tricoter?'' ''Ben oui!'' ''Ben vous aller tricoter en masse.'' Ma grand-mère était EN TRAIN DE tricoter.

6-Liste des aliments que je mangerais sans arrêt
-Des oeufs Cadbury de Pâques (sucre+gras+goût de chocolat, mmmm)
-Des Tacos
-Des biscuits (n'importe lesquels!) du moment que j'ai assez de lait pour les diper dedans.
-La soupe de ma mamie (pas celle qui aime tricoter, l'autre). Souvent imité, jamais égalé.
-Tout ce que tu cuisines, amour
-La sauce à spaguetti de mon père. À chaque fois, il repousse les limites de l'impossible.

7-Liste des pires brosses
-Ma fête de l'an dernière: j'ai bu comme une brave, j'en ai pratiquement gerbé sur le murs. Plus jamais.
-Avec miss Montréal, ça a fini en patte cassé. La mienne, oui oui.
-Avec miss Alberta, un soir de mai, avant qu'elle parte pour de bon en Alberta...On a commencé à 13 heure avec un diner sushi et fini vers 2 heure du matin en jouant au Scattergorie. Foutu belle journée, mais le lendemain au travail, la journée était longue!

8-Liste des road trip
-Avec miss Polynésie et miss Montréal, on est parti à Portland, Maine, USA...Pourquoi au juste? Voir la mer, je pense.
-Avec miss Montréal, tout ceux pas fait encore et auxquelles je rêve...

9-Liste des plus grandes peines
-L'abolition des duchesses du Carnaval
-Toutes les peines d'amours
-Toutes les peines d'amitiés...Si vous saviez comment que je regrette!

10-Liste des rêves:
-Avoir des enfants en bonnes santées
-Partir dans le Sud avec miss Montréal et miss Alberta...mais peut-être pas en même temps!
-Écrire un roman (j'y travaille)
-Être heureuse (j'y travaille aussi)

Ça va être suffisant pour aujourd'hui...

Au coin de la Frimousse et de Ti-Coq

Cette histoire fut créée lors d'un défi littéraire entre moi, mon papa et mon copain. Le thème était : "Le banc public" et le style, policier.
Mardi matin, 7h05

«T’en veux-tu une froide?»

La grosse main aussi large qu’un autobus tenait une bière plus grande encore qui à elle seule aurait pu remplir une piscine de houblon. L’affiche hurlait l’air du temps, une publicité machiste et puérile où il était question de boire pour-se-désaltérer-pis-pogner-avec-full-de-pitoune-pis-triper-avec-tes-chums-dans-un-bar-sportif-yeah! Elle était bien située par contre, il faut lui attribuer ce mérite : au coin de la rue De La Frimousse et de l’avenue Ti-Coq, soit le centre névralgique de la ville. Une pancarte située à cet endroit valait au bas mot plus de 50 000$ par jour, ce qui n’est pas de la tarte. Plus de 2000 voitures, autobus, bicyclettes et un nombre incalculable de piétons convergeaient tout les jours sur ce tronçon de rue : achalandé serait un euphémisme dans de telle circonstance. Alors dans ce cas, pensait sous son chapeau l’inspecteur Dionne, comment diable un tueur a-t-il pu placer dans une mise en scène grotesque le corps démembrée et mutilée d’une jeune femme sur le banc public qui se trouvait sur le coin de la dite rue?

Vraiment, il n’en avait aucune idée.

L’inspecteur Dionne fronça les sourcils (il avait l’arcade fournie) : il aimait les enquêtes, cela sautait aux yeux, il était policier nom d’un chien! Mais il n’aimait pas, mais alors là pas du tout, qu’on se paie sa gueule.

4 jours plus tôt, vers 21h00

Rebecca se mirait dans le miroir, admirant ce qu’elle avait de plus que les autres, à savoir : de nouveaux seins. Elle n’était pas escorte, elle n’était pas serveuse dans un bar, elle n’était pas agente immobilière : elle était plate comme une planche à repasser. Sa nouvelle poitrine n’était pas énorme, juste un petit renflement, une petite colline. C’était joli comme tout.
Pour agencer avec ses nouveaux seins, Rebecca choisi une robe rouge corail, légèrement décolleté. Elle l’avait depuis toujours, mais aujourd’hui elle tombait mieux. Elle se maquilla avec soin, peigna ses longs cheveux noirs et mit ses plus jolies chaussures. Rebecca s’admira une dernière fois dans la vanité (quelle allure!) et sortie de son appartement, sans nourrir son chat, Poutine. Elle pensa, à tort, qu’elle pourrait lui donner sa moulée en revenant le soir.

Mardi, vers 9h00

L’inspecteur Dionne en était à son 4e café filtre et il songeait sérieusement à une injection par intraveineuse, quand le lieutenant Parent entra sans tambour ni trompette dans son bureau.

-Et puis? Fit ce dernier, les mains dans les poches, qu’est-ce qu’on a?

-Rien. Lui répondit l’inspecteur Dionne.

-Je vous demande pardon?

-Rien. J’ai dit : R-I-E-N. On est baisé. Je suis baisé. J’en ai marre, je démissionne, je me casse de ce foutu service de merde, je…

-Inspecteur Dionne, je vous ai connu plus combatif.

L’homme aux sourcils impérieux se renfrogna. Puis il tonna :

-Merde lieutenant, on a rien : pas de témoin, pas d’indice, pas de mobile…

-Mais vous avez un cadavre, lui répondit le lieutenant Parent.

-Ben oui, mais…

-Ben c’est déjà ça de pris.

L’inspecteur Dionne fut pris de cour par l’optimisme galopant de son supérieur.

-Alors, fit le lieutenant Parent, vous aller me faire parler ce cadavre mort : d’où il vient, où il allait, pourquoi, comment, à quelle heure, qui il a rencontré… Tout! Interroger tout le monde, virer la ville à l’envers s’il le faut, je vous donne le feu vert.

L’inspecteur Dionne soupira et se lança :

-Rebecca Boulanger, 25 ans, infographiste, célibataire, soufrait de calculs rénaux, 3 plombages, n’avait plus d’amygdales, a mangé 3 toasts aux bananes le matin, est allée à Cayo Coco dernièrement, joueuse de poker, mais mauvaise perdante, s’est fait refaire les seins depuis 3 semaines, aimait les chats, le rose et les pivoines, rêvait du prince charmant, d’une maison en campagne et il lui arrivait de péter au lit.

Devant l’air abasourdi de son supérieur, l’agent Dionne se sentit légèrement euphorique, comme quand on connait la fin d’une blague et notre interlocuteur non.

-On sait tout, tout, tout sur elle, lieutenant. On sait qu’elle est sortie de chez elle il y a 4 jours, sans nourrir son chat. Mais pour aller où? Personne dans ses amis, ses contacts, son milieu de travail ne le sait.

Il savoura l’instant quelques secondes puis il murmura :

-Je vous avais averti lieutenant…On est baisé.

Mardi, vers 7h30 le matin

Jeanne Chabot sirotait son thé vert en écoutant Salut, Bonjour!. Elle arrivait tout juste de travailler et songeait sérieusement à prendre une douche avant de se mettre au lit; Jeanne était infirmière dans un CHSLD.

Son chat se prélassant sur ses jambes, Jeanne le flattait tout en écoutant distraitement les blagues plus ou moins réussis de l’animateur, quand tout à coup, elle entendit une nouvelle qui fit dresser son poil sur ses bras.

4 jours plus tôt, 22h30

Rebecca se laissait bercer par le doux tremblement du métro, sentant pour la première fois de sa vie ses seins bouger pendant que véhicule tanguait. Elle ferma les yeux, sourit. Quelle agréable sensation! Toute occupée qu’elle était à vivre de nouvelle sensation, elle ne remarqua pas l’homme qui la fixait, ni le renflement qui soulevait son pantalon. Si Rebecca avait ouvert les yeux à ce moment, elle aurait vu ses yeux posé sur elle qui la scrutait, la déshabillait, la léchait. Quand elle sortit du métro, il sortit tout juste derrière elle, le pas rapide.

Mardi, 7h31 le matin

Jeanne ne caressait plus son matou dans le sens du poil. Ce dernier cracha et cela sortit Jeanne de sa torpeur.

«Une femme de 25 ans a été découverte hier matin très tôt par la police. Le corps était dans un état de décomposition avancé ce qui indique que le crime a eu lieu il y a 4 jours. On a découvert la victime, et c’est ce qu’il y a de plus incroyable, sur le banc public au coin de la rue de la Frimousse et de l’avenue Ti-Coq. La police recherche toutes personnes possédant des informations et là dessus, nous allons rejoindre notre collègue Claude Poirrier…»

Jeanne ne pouvait plus respirer. Elle sentait la sueur lui glisser sur les tempes, moites et humides. Elle n’entendait plus rien, ne sentait plus rien, seule la panique la tenait.

Car Jeanne avait vu le meurtrier, elle avait vu la victime. Et elle n’avait rien fait.

4 jours plus tôt, 22h45

Rebecca sentait le vent dans ses cheveux et ça la faisait sourire. Tout ce soir était une source d’émerveillement : la musique qui sortait des boites de nuit, l’air chaud de la ville, les lumières qui tuaient la noirceur, tout la rendait heureuse. Ce soir elle sortait dans un bar avec la ferme intention de mettre fin à un an de célibat. Ce soir, elle baisait. Et ça, c’est une raison pour être de bonne humeur.

Elle marchait doucement, sans autre idée en tête que celle d’être culbutée brutalement quand un homme derrière elle lui demanda du feu. Elle se retourna pour lui dire poliment qu’elle n’en avait point et pour lui sourire. Elle était si heureuse!

4 jours plus tôt, 22h30

Qu’est-ce qu’elle était belle! Mais elle était sale…si sale. Ses seins n’était pas vrai, son maquillage trop criard, elle hurlait par tout les pores de sa peau : «Baiser moiiii! Je suis toute à vous, qui que vous soyez!» Elle était belle comme Marie mère de Dieu, mais pute comme Marie-Madeleine. La mission de John était de purifier l’humanité tout entière de sa saleté, des prostituées qui salissaient le Saint Nom du Sauveur, son but était de purger la terre des fausses idoles. Alors quand la femme à la robe corail sortie du wagon, il la suivi sans hésiter.

Mardi, vers 10h00

Jeanne sirotait son café, les yeux baisés. Elle avait terriblement honte. Elle connaissait à l’avance les questions qu’on lui poserait : comment diable elle, une infirmière, n’avait pas été capable de reconnaitre un cadavre quand elle en avait vu un? N’avait-elle pas été à l’école? N’avait-elle pas vu des corps morts et embaumés dans des cours d’autopsie? Dans son hospice de vieillard, ne lui arrivait-il pas de trouver des personnes décédés durant la nuit, la bouche édentée grande ouverte et les yeux vitreux? N’était-elle pas habituée à ce genre de choses?

L’inspecteur Dionne entra dans le bureau, son énième café à la main. Il éprouvait une certaine fierté d’avoir enfin un témoin et attendait beaucoup de lui; il s’imagina quelques secondes en train de lui botter le derrière hors du bureau si jamais ce témoin ne lui apprenait rien, puis se ravisa. Il jeta son café, pressa sur le bouton record de son enregistreuse et entreprit son interrogatoire.

-Mardi le 3 juin, 10 heure du matin. Le témoin est madame Jeanne Chabot et l’inspecteur en service est Paul Dionne. Alors, madame Chabot, commençons par le début voulez vous?

Jeanne suait à grosse goûte. Elle était incapable de quitter des yeux les sourcils de l’inspecteur Dionne qui était secoués par un tic nerveux. Elle déglutit et commença son récit.

-Je suis infirmière de nuit dans un CHSLD. Chaque matin, je finis mon quart de travail à 5h00 moins le quart, puis je rentre chez moi à pied. Ce matin là, j’étais dans la brume : ma supérieure m’avait dite que je ne valais rien parce qu’un patient est mort ébouillanté dans son bain par une préposée aux bénéficiaires qui était sous mes ordres. Je sais que ça ne me pardonne pas…Mais j’étais présente de corps seulement, pas d’esprit ce matin là quand j’ai vu le meurtrier déposé le cadavre au coin de la rue de la Frimousse et de l’avenue Ti-Coq.

4jours plus tôt, 23h00

Il l’avait violé, il l’avait humilié, il avait craché sur ce beau corps prétentieux de femme pute qui reniait sa fonction de mère de Dieu. Il lui avait ensuite défoncé le crâne à coup de roche, la première chose qui lui était tombé sur la main dans le terrain vague où il était. Maintenant il la contemplait, dubitatif. Il n’avait pas vraiment prévu régler le sort du monde ce soir, il n’avait même pas son couteau avec lui. Ce crime, bien que libérateur, n’était pas prévu.

Il parti donc, abandonnant le corps mutilé où il l’était. Quinze minutes plus tard, il avait complètement oublié son existence.

Mardi, vers 10h15

Jeanne termina son café et poursuivi son histoire.

-J’étais fatiguée et en colère contre le monde entier. Vous comprenez inspecteur, quand la terre semble s’être liguée contre vous pour vous cracher à la figure? Hé bien je me sentais comme ça. En plus, il brumassait et le temps maussade me donnait envie de me coucher en petite boulle et de pleurer toutes les larmes de mon corps. Je suis passé par la rue de la Frimousse et au coin de la rue, j’ai vu un homme disposé des morceaux de ce qui me semblait être un mannequin ensanglanté sur le banc public. Je me suis arrêté et je lui ai demandé ce qu’il faisait là…Il m’a répondu, le plus naturellement du monde…

3 jours plus tôt, 3 heures du matin.

«Shit de marde!!» hurla en son fond intérieur Steve Pouliot. Il essayait de mettre ses idées en place, mais il n’y arrivait pas : tout allait trop vite, il ne pouvait pas mettre le doigt sur une pensée consciente précise qu’elle s’échappait, fiiiioooouuutt! Il se pinça le nez, convaincu que ses idées finiraient par lui sortir par les narines.

Steve Pouliot vivait dans la rue depuis 6 semaines maintenant. Avant il avait habité un bel hôpital, mais on avait décidé de lui donner une petite chance, histoire de voir s’il pouvait vivre en société comme un grand et de ne plus être à charge de l’état. Steve avait habité une maison de transition, puis avait oublié ses clés et ensuite son adresse. Comme ses médicaments étaient dans sa chambre, il n’en avait pas pris depuis 6 semaines. Sa psychose avait commencé il y a 5 jours, mais Steve ne s’en rappelait pas. Tout ce qu’il savait, c’est qu’il était en grand danger.
Il déambulait dans le terrain vague quand il entendit une voix qui lui murmura de faire attention aux monstres. Il y en avait beaucoup dans les parages et Steve devait faire attention à ses jambes, car les créatures diaboliques aiment s’y agripper. Les voix disaient qu’ils n’y a qu’un moyen de vaincre les monstres : les détruire. Les hacher menus, déchirer leurs entrailles, manger leurs organes et boire leur sang pour acquérir leur puissance. En dehors de ça, point de salut.
Steve vit alors une effroyable créature.

Elle était couchée sur le dos, les jambes écartées. Son ventre plat luisait sous la lumière de la lune et ses seins semblaient se mouvoir, comme pour attirer à eux des bouches pleines de crocs. Son visage avait disparu, laissant la place à un éclat sanguinolent. Steve eut si peur qu’il fit pipi. Mais la voix murmura et Steve sut d’office ce qu’il devait faire.

Mardi, vers 10h20

Jeanne gardait les yeux rivés sur la table.

-Il m’a dit…quand je lui ai demandé ce qu’il faisait là…Il m’a dit qu’il faisait une exposition. Qu’il était un artiste. Comme on habite dans une ville de fou et que les artistes sont tous des fous en puissances, j’ai pensé… Enfin vous comprenez, j’étais fatiguée, je voulais rentrer chez moi et me coucher…je pensais que c’était un mannequin, vous comprenez? Je ne pensais pas que c’était vrai! Je..je ne pouvais pas croire que c’était vrai!

L’inspecteur Dionne sentit sa pression monté d’un coup sec.

3 jours plus tôt, 7 heures du matin

Steve allait mieux. Il se sentait épuisé, mais glorieux, de la fatigue du guerrier qui a défendu la ville des ignobles créatures qui la peuplent et la salissent. Il avait du travailler fort, briser les os avec des roches, découper la chair avec ses dents, boire le sang et avaler les entrailles, mais le résultat en avait valu la peine. Il avait disposé le corps sur un banc public, comme les voix l’avaient dite. À la femme qui lui avait demandé se qu’il faisait, il lui avait répondu la vérité. Il exposait la créature, pour que les autres monstres aient peur. Qu’ils soient effrayés par sa puissance et qu’ils reculent dans les ombres d’où ils proviennent. Steve était l’artisan qui détruit les démons et sauvent l’humanité, il était le guerrier sans peur qui trucide les créatures de la nuit.

Steve était heureux. Il ne savait pas encore que dans quelques jours, il serait de retour dans sa maison, ni que ce serait l’inspecteur Dionne qui le borderait dans son petit lit. Et au dessus du banc public, la publicité continuait d’hurler ses promesses de rafraichissements et de bonheur artificiel, saveur simulé des rêves qui meurent au coin de la rue de la Frimousse et de l’avenue Ti-Coq.

mercredi 30 juin 2010

Paparoni et l'alligator d'Amazonie

À mon papa, chasseur d’alligator…

Les débris d’un souper bien arrosé trônaient sur la table : 2 verres de vins tâchés de rouge, une corbeille où subsistait une tranche de pain séchée et 3 assiettes qui contenaient les vestiges d’un délicieux rôti de bœuf. Maude, 7 ans, rayonnait : le samedi soir elle avait ses parents pour elle toute seule. Ces derniers étaient cordonniers et travaillaient tout le temps. Quand ils revenaient le soir de leur travail, la lune était en pyjama. De plus, papa Noël avait laissé sous le sapin une petite sœur 2 ans plus tôt et Maude trouvait que cette dernière prenait beaucoup trop de place dans le cœur de sa maman. Mais ce soir, Mimi dormait et Maude en temps que grande sœur pouvait se mettre au lit plus tard et veiller ainsi avec papa et maman. Rien n’aurait pu la rendre plus heureuse, sauf peut-être quelques biscuits aux chocolats qu’elle ferait tremper dans sa coupe de lait.

Soudainement, maman cessa de rire et le silence autour de la table devint bruyant. Papa regarda Maude et lui dit, gravement :

-Ma pitchounette, est-ce que tu savais que papa garde un alligator dans le sous-sol?

Maude se mit à rire et regarda sa mère, mais celle-ci ne riait pas du tout. Parfois papa lors d’un souper «prenait un coup» et il lui arrivait alors de dire des folies. Mais dans ces cas là maman Loulou disait : «Voyons, arrête donc René!» et papa redevenait sérieux comme un pape. Voyant que sa mère ne disait rien, Maude lui demanda :

-Maman, est ce que paparoni dit la vérité ou est-ce qu’il dit des foleries?

-Ma belle pitoune, répondit sa mère, ce que ton père dit est vrai. Il y a vraiment un alligator dans le sous-sol.

Maude fixa son père, éberluée. Ils vivaient ici dans cette maison depuis 2 ans; Maude en avait visité chaque parcelle du sous-sol en jouant à la cachette avec ses amis. Mais jamais n’y avait-elle vu, ni même remarqué, un alligator.

-On va finir de souper, dit son père, et ensuite nous allons attendre environ une heure. Comme ça, nous serons certains qu’il sera endormi quand nous irons le voir. Nous allons nous préparer, nous prendrons chacun une «flash light»…Mais avant tout autre chose, il faut que je te raconte comment cet alligator est entré en ma possession.

Il se servit un verre de vin rouge, fit claquer sa langue et racla sa gorge. Maman Loulou fit un large sourire à Maude, l’air de dire : «Tu vas voir, cette histoire je l’ai entendu milles fois, elle est terrible!» Puis papa commença.

-Ma pitchounette, tu te souviens de mon ami Louis? Celui qui a nagé avec des piranhas dans l’Amazone?

Maude acquiesça.

- Je ne te raconterais pas l’histoire une autre fois, tu la connais déjà assez bien. Mais imagines toi donc que, bien que je n’aime pas trop en parler, j’étais avec lui lors de ce voyage! Oh je sais, je ne l’ai jamais mentionné avant, mais tu me connais : je suis humble, un peu réservé, je ne voulais pas lui voler la vedette! Nous étions donc tous les deux jeunes, beaux et fougueux au Brésil à la recherche de nouvelles aventures. C’est sur un coup de tête que nous avions décidé de partir en Amérique du Sud. Ma rencontre avec l’alligator s’est déroulée à la fin de ce voyage.

Il prit une gorgé de vin avant de poursuivre.

-Nous étions donc moi et Louis à la recherche d’extraordinaire, de grandiose, de folie, de sparatagonflant quoi! Nous étions tout les deux jeunes et fous, alors rien ne nous semblait assez dangereux, assez incroyable, assez phénoménal! Voilà pourquoi une croisière sur l’Amazone s’est imposée d’office. Nous avions rencontré un homme, un dénommé Sergio, dans un bar d’Obidos une ville qui borde l’Amazone. Nous lui avions payé quelques bières et l’avions rapidement mit dans notre petite poche arrière à force de rire avec lui et de lui payer des tournées. Nous étions fort éméchés quand nous avons osé lui proposer de nous amener en pirogue sur le fleuve… et qu’il a dit oui. Vois-tu, pitchounette, l’Amazone est un fleuve hostile : il faut être fou pour oser s’y aventurer. Quoi qu’il en soit, nous fixâmes un rendez-vous à Sergio pour le lendemain matin. Louis, moi et Sergio avions rendez-vous avec notre destin, mais nous ne le savions pas encore. Nous étions bien trop éméchés pour nous rendre compte de quoi que ce soit!


Papa prit une cigarette dans son paquet, l’alluma et en tira une bouffée. Puis il reprit.

- Le lendemain nous avions dégrisé, mais nous étions toujours autant décidé, sinon même plus que la veille: nous irions sur le fleuve quoi qu’il advienne. Notre guide Sergio fut à l’heure au point de rendez-vous et nous partîmes aux aurores. Sergio nous apprit rapidement les règles de base : comme je l’ai dis plus tôt pitchounette, l’Amazone est un fleuve sauvage et terrible. Ceux qui s’y aventurent doivent être extrêmement prudent! Plus tard dans la matinée, Louis s’est baigné avec les piranhas, comme tu le sais déjà puisqu’il te raconte cette histoire à chaque fois qu’il te voit. Moi, j’étais dans la pirogue avec Sergio quand j’ai entendu un bruit : comme un plouf, tu vois? J’ai regardé autour, mais je n’ai rien vu. J’ai demandé à Sergio, mais lui non plus n’avait rien aperçu.

Il éteignit sa cigarette avant de poursuivre.

-J’étais donc avec mon guide dans la pirogue, à dialoguer des aléas de la vie au Brésil quand soudain, je l’ai vu. Comment te dire à quoi cela ressemblait? On aurait dit un tronc d’arbre, mais il se déplaçait trop rapidement, glissant dans l’eau sans provoquer aucunes éclaboussures : seules quelques vaguelettes trahissaient sa présence. Aussitôt j’ai compris que la situation était grave : mon ami Louis se baignait, il n’avait donc pas vu la créature marine qui se déplaçait vers lui dans l’optique fort évidente d’en faire son déjeuner! J’ai alors fais ce que tout être humain sensé n’aurait pas fait : je me suis jeté à l’eau dans l’idée complètement folle de lutter contre l’alligator.

Papa fit une pause, les yeux rivés à la table.

-C’était une idée insensée, pitchounette, complètement folle. Comme si moi je pouvais battre un alligator! Il faut dire qu’à l’époque j’étais plus mince qu’aujourd’hui, j’étais tout en muscle! Pas une once de graisse! Tout de même c’était imbécile de ma part que de tenter le coup et c’est sous les cris terrifiés de Sergio que j’ai pris l’alligator à bras le corps et que nous commençâmes à lutter. Mon adversaire était énorme, il devait faire au moins 3 mètres de long, ses dents étaient acérés comme des couteaux de cuisines, sa force m’entrainait inlassablement vers le fonds de l’Amazone…Mais pourtant je luttais et pif! (il mima le geste) Un coup sur le museau! Paf! Un autre dans le ventre! J’ai lutté avec une telle ardeur pitchounette qu’à un moment le guide s’est levé dans la pirogue et qu’il s’est mis à m’hurler des encouragements! Et sur les grèves du fleuve des indigènes attirés par le combat d’homme à animal dansaient comme des majorettes du Carnaval, scandant RE-NÉ, RE-NÉ, RE-NÉ!

Maude ne bougeait plus, fasciné par le récit de son père.

-Finalement, j’ai décroché un coup de droite et l’alligator s’est avoué vaincu. Mais il était tout bouffi, le pauvre, il n’avait plus un croc, son corps était couvert de bleu…Alors j’ai dis à Louis, qui nous avait finalement rejoint : «On ne peut pas le laisser comme ça…» Tu vois, Maude, cette bête je l’ai battu, j’ai lutté avec elle si fort qu’à la fin, une forme de respect s’était imposé entres nous. C’est la dure loi de la jungle, pitchounette, les plus faibles témoignent de leur respect au plus fort et en échange, les plus forts leur offre à leur tour leur protection. De plus, ce pauvre alligator, comment aurait-il pu continuer à chasser? Sans dents ni rien? Et ses comparses alligators sur les berges du fleuve qui riaient de lui, la gueule grande ouverte! Non je devais le ramener. Bon, je te l’accorde, ce fut compliqué de passer avec lui aux douanes, ça fait toute une histoire… C’est depuis ce temps que je le garde en bas, au sous-sol. Je le nourris, je le soigne…Parfois on boxe un peu, en souvenirs du bon vieux temps. Je le laisse gagner, toujours. C’est ma façon à moi de lui témoigner mon amitié. Et maintenant, il est temps pour moi de te le présenter.

Les trois se levèrent d’un bon, comme si un ressort les poussait hors de la salle à diner. Maude, son papa et sa maman prirent chacun une lampe de poche et maman éteignit toutes les lumières. L’alligator n’aimait pas la clarté, il préférait les ténèbres qui lui rappelaient son Amazone natal. L’enfant et ses parents se mirent à la queue-leu-leu et descendirent l’escalier qui mène au sous-sol. Maude riait, pensant ainsi camoufler sa terreur. Un alligator! Pensait-elle. Un vrai, comme elle a vu dans les livres! Un alligator, dans son sous-sol à elle! Qu’est ce qu’elle était excité, elle allait le dire à TOUT LE MONDE lundi matin à la garderie, puis à l’école, elle sera la fille la plus POPULAIRE! Maude riait, sans pouvoir s’arrêter. Sur son épaule la main de sa mère reposait doucement, comme pour dire : «Tant que je serais là, ya pas un alligator qui va prendre une bouché de toi ma pitoune!»

Ils entrèrent dans une des pièces du sous-sol, celle où son père gardait ses outils. Il lui avait jadis interdit d’y venir, elle comprenait maintenant pourquoi.

-Chut, murmura son père, je vais le prendre et te le montrer...Mais il ne faut pas faire de bruit!

Ce qui la frappa en premier, c’était l’odeur.
Maude avait déjà été au Biodôme de Montréal avec sa classe. Dans la zone « tropical-humide », l’air avait été étouffant. L’odeur des plantes tropicales et des zones d’eau stagnante lui avait fait tourner la tête…et la chaleur! Comme si elle était en pleine canicule au mois de juillet. Dans le sous-sol, l’air était saturé d’une autre odeur, indescriptible, comme du foin qui aurait moisi sous l’effet de la chaleur et de l’humidité. Un relent aussi, un effluve de cuir, comme à la cordonnerie.
Et dans un coin sombre dormait, lové sur lui-même, un vieil alligator amazonien de 6 pieds de long dont la respiration faisait enfler et diminuer le ventre par à-coup. Quand il bailla, Maude remarqua avec stupeur qu’il n’avait effectivement plus aucunes dents.

Son père se pencha alors au dessus de son épaule et murmura à son oreille, pour ne pas réveiller la bête qui dormait : « Alors ma pitchounette, ne te l’avais-je pas dit que papa avait un en sa possession un alligator d’Amazonie?